Il est urgent de mieux accompagner les aidants 

Danièle Noël
Aidants. Guidel2024
(© @MoDem 54)

À l’occasion de Journée nationale des aidants, qui a lieu chaque 6 octobre, le Mouvement Démocrate de Meurthe-et-Moselle (Modem 54), par la voix de sa vice-présidente, Danièle Noël, entend bien réitérer son appel, élever les consciences, l’attention et la mobilisation de tous, au quotidien, sur le sort de ces millions de personnes qui s’occupent d’un proche fragile, handicapé ou âgé. 

Durant des universités de rentrée du MoDem qui se sont tenues à Guidel du 27 au 29 septembre, Danièle Noël, a accepté de livrer son témoignage, son vécu d’aidante, lors d’une plénière animée par le député du Rhône, Cyrille Isaac-Sibille, autour de Geneviève Darrieussecq, Ministre de la Santé et de l'Accès aux soins.

Un récit de vie qui touche l’intime et se vit trop souvent dans le silence ou l’indifférence : 

 « Les aidants ne sont pas des "supers-héros" Aujourd’hui, un aidant sur trois décède avant l’aidé.

60 % des aidants sont exposés à un risque de surmortalité dans les trois ans qui suivent le début de la maladie de leur proche. Ils sont aussi 46 % à souffrir d'une maladie chronique. Nous pouvons tous, à tout âge, être amenés à accompagner et soutenir un proche au quotidien.

En 2030, un actif sur quatre pourrait être concerné par cette problématique.

Les aidants sont des piliers du système de santé, et si demain ils n’étaient plus là, alors il faudrait trouver une solution aux millions de gens dépendants. 

Je suis aidante auprès de ma mère qui, à l’âge de 70 ans, a commencé à manifester des signes de démence sénile, apparentés à la maladie d’Alzheimer. Peu à peu, elle a commencé à perdre les gestes simples du quotidien. Elle a aujourd’hui 94 ans et est maintenue à son domicile.

Tout naturellement, je suis devenue aidante, comme les 11 millions d’aidants que nous sommes en France. On ne se rend pas compte que l’on devient un aidant. Cela paraît normal ; aider, c’est aimer. Je n’avais aucune idée du parcours que ça allait prendre.

L’acte d’aider devient une charge de travail qui, progressivement, va crescendo. Il devient douloureux tant pour l’aidant que pour le proche dont on s’occupe, et plus encore quand son état de santé s’aggrave. 
De fait, du rôle d’aidante, je suis passée parfois à celui de soignante, à devoir faire des points de suture ou poser des agrafes alors que je ne suis pas formée pour ça.

L’aidante que je suis, s’est souvent trouvée extrêmement seule et parfois sans savoir où frapper.

Comme toutes les personnes qui doivent gérer la démence sénile, on vit un deuil blanc, un deuil qui n’en finit pas.

Cela explique également que le cercle de famille se rétrécit, l’entourage se fait de moins en moins présent, car la situation que l’on vit est comme un miroir qui peut refléter ce que l’on vivra soi même, demain. Et ça fait mal, très mal.

La charge mentale devient énorme. On se retrouve constamment en état d’hypervigilance, sursautant au moindre appel téléphonique. Il faut apprendre à vivre au jour le jour, tout en essayant de conserver sa propre vie, savoir jongler et montrer bon visage.

De fait, le plus souvent, on s’oublie, on n’existe plus, on est invisible.

Dire que l’on est aidant reste encore tabou dans notre société. Les aidants doivent toujours lutter contre le regard et le jugement des autres; un regard qui peut devenir cruel soit par manque de compréhension soit par manque d’humanité. Alors on courbe l’échine, on se tait, et on finit par s’oublier soi-même.

Les aidants sont pourtant indispensables à la société, à la vie de leur proche -très souvent au prix de la leur- mais aussi à notre système de soins.
Lorsqu’ils font le choix d’accompagner pleinement un proche âgé, malade, ou en situation de handicap, ils le font à côté de leur travail, de leurs études pour ce qui concerne les jeunes aidants, ou parfois mettent le tout entre parenthèse. 

Quand l’aidant est fortement investi dans sa mission, il met sa santé en danger ;  troubles du sommeil, douleurs physiques … Tout cela affecte le moral. Pourtant, pour être un aidant efficace, un bon état de santé est primordial.

Être aidant, c’est gérer 1001 choses et se poser beaucoup de questions

Quelles aides solliciter ? Comment se faire relayer ? Comment se préserver ?
Chaque étape de la vie d'aidant est pavée de questions et démarches. 

L’aide des auxiliaires de vie et des infirmiers est précieuse. Celle des kinésithérapeutes, des ergothérapeutes l’est aussi. Or, il faut du temps pour savoir mettre en place un protocole efficace qui laisse un peu de répit aux aidants.
Trouver un moment de repos, ce n’est pas évident. Prendre ce moment de repos sans souffrir d’un énorme sentiment de culpabilité, ce n’est pas gagné d’avance non plus.

Avant de faire appel au droit au répit, beaucoup d’aidants sont en grande souffrance.

IL EST URGENT DE MIEUX ACCOMPAGNER LES AIDANTS 

La priorité est de leur accorder un réel statut.

Des avancées ont été réalisées, notamment à l’égard des aidants familiaux qui conjuguent travail et aidance de leur proche.

Cependant, même s’il y’a plus d’informations, de communications sur le sujet, la simple définition de proche aidant est très récente et parfois les gens ne se reconnaissent pas sous cette étiquette. Le statut d’aidant familial est, au demeurant, flou. Les règles applicables aux aidants forment une mosaïque qui est loin de donner naissance à une notion juridique unifiée de « proche aidant » . Il y n’existe pas à proprement parler d’un statut de l’aidant. Il n’y a toujours pas d’attestation prouvant que vous êtes aidant.

En deuxième point, il est essentiel de mieux former les auxiliaires de vie qui ne sont pas toujours prêts à faire ce travail très difficile : il faut former des aidants professionnels et uniformiser la formation des auxiliaires de vie. Les médecins eux-mêmes ne savent pas toujours à quoi peut ressembler le quotidien d’un aidant.

Il est nécessaire de donner envie aux gens de se former aux métiers du médico-social et du paramédical, il faut revaloriser ces métiers en souffrance qui peinent à recruter et qui sont pourtant essentiels. Plus largement, le bien vieillir au domicile ne saurait se passer de ces changements cruciaux.

Un enjeu d’avenir

L’ état d’épuisement physique, mental, émotionnel d’un aidant met en évidence les lacunes existantes et les progrès qui restent à mener.

Il faut valoriser les personnes aidantes, à tous les niveaux de la société. Avec une population vieillissante et des maladies chroniques en augmentation, "c’est un enjeu d’avenir".

Depuis la période du Covid, la question des aidants ne bénéficie pas d’autant d’attention, ni d’assez de moyens au niveau national, comme au niveau local où les départements ont un rôle à jouer. Ceux-ci pourraient mener une véritable politique territoriale vis-à-vis des aidants mais, pour le moment, ce n’est pas le cas ; en tout cas pas de manière uniforme et efficace dans tous les départements de France et d’Outre-Mer où l’on note de grandes disparités.

Enfin, il appartient de clarifier tant les informations que les aides qui existent, et sur ce point, les acronymes, la multiplicité des structures ne facilitent pas les démarches.

La stratégie 2023-2027 parle d’un guichet unique (engagement 2/Création dans tous les départements d’un interlocuteur unique pour les aidants) et j’espère vraiment que cela va se faire. 

 Susciter une prise de conscience sociétale

Rendre visible et accompagner les aidants, c’est exactement ce que nous souhaitons, nous, aidants. Sortir de l’ombre et être accompagné, voire valorisé car l’aidance nous fait acquérir de multiples compétences. Elle nous fait développer d’incroyables capacités d’adaptation, d’organisation, d’efficacité et de gestion humaine. En entreprise, on appelle ça les « soft skills ».

Il faut donc susciter une prise de conscience sociétale sur notre réalité.

C’est l’intitulé de la campagne 2024 du ministère en charge des Solidarités. 

C’est pour cela qu’il faut vraiment faire de la pédagogie pour accompagner les aidants, et pour changer le regard des non-aidants. »

Guidel, #URMoDem 

#JNA #Aidants 

Danièle NOËL et toute l’équipe du MoDem 54 tiennent à remercier les membres du Bureau exécutif du Mouvement Démocrate pour leur engagement dans la cause des aidants familiaux 

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